La maison collective de Malagnou a été perquisitionnée le mercredi 26 avril au matin par un impressionnant dispositif policier. Les habitant.e.s ont été très surpris.e.s de se voir confisquer du matériel collectif ainsi que des effets personnels apparement sans intérêt. Un habitant a été arrêté et emmené en garde-à-vue. Libéré depuis, il est la dernière victime collatérale de la détermination du Conseil d’Etat à faire tomber notre maison, il paie la facture pour une lutte qui a déjà trouvé un très large soutien et ennuie visiblement les autorités.
Depuis octobre 2016, les habitant.e.s de l’ancienne station de zoologie du 154, route de Malagnou (Chêne-Bougeries) luttent contre le Conseil d’Etat genevois pour conserver leur logement et espace de vie. La stratégie de l’Etat s’est organisée sur deux fronts : d’abord une communication totalement inefficace et volontairement confuse qui présente l’évacuation comme une décision « apolitique ». Ensuite, en multipliant les intimidations policières envers les membres de Malagnou, en organisant des filatures et en multipliant les contrôles d’identité, notamment le 25 janvier après une conférence de presse organisée par le collectif.
Un nouveau cap a été franchi le 26 avril puisque cette fois-ci, la police anti-émeute a carrément fait le déplacement dans les locaux et a emmené un habitant en garde-à-vue. L’habitant (Alexandre – prénom d’emprunt) se rendait à son travail lorsqu’il a été arrêté par une voiture de la police genevoise. Le prétexte invoqué était que sa voiture ressemblait à une voiture utilisée lors de plusieurs cambriolages. Devant l’air complètement interloqué du conducteur, des explications débutent. Mais une autre voiture surgit alors avec à son bord des éminents membres de la police politique locale – qui passaient sans doute par là par hasard à 7 heures 30…
C’est en tout cas ce qu’ils ont prétendu en arguant que justement, ils avaient en leur possession un mandat de perquisition pour son domicile du 154 route de Malagnou, en l’occurence la chambre de l’accusé et les espaces communs. C’est seulement à ce moment là que les forces de l’ordre l’ont informé qu’il était accusé d’avoir participé à une manifestation pour la culture alternative de décembre 2015, qui avait fait grand bruit à l’époque. Les policiers ont donc conduit ce charmant jeune homme jusqu’à Malagnou pour procéder à la perquisition.
Les habitant.e.s de la maison se sont donc retrouvés à l’heure du petit-déjeuner entourés d’une quinzaine de pandores en tenue anti-émeute et d’une dizaine d’autres en civil farfouillant dans la maison. Ceux-ci ont d’abord refusé de présenter le mandat en entier, puis refusé de remettre un procès-verbal des objets saisis, c’est-à-dire l’ensemble des ordinateurs collectifs de la maison, des vêtements supposés appartenir à Alexandre ainsi que l’ordinateur d’une habitante qu’elle utilise quotidiennement pour achever son travail de mémoire. A noter qu’ils ont également saisi un cabas en papier contenant des masques de Serge Dal Busco utilisés pour le premier rassemblement que nous avions organisé le 20 octobre 2016…
Rapidement averti-e-s, de nombreux soutiens ont afflué pour rejoindre les habitant.e.s durant la perquisition. L’ambiance était tendue, mais les habitant.e.s ont su garder leur sang-froid face à l’invasion de la maison par les forces de l’ordre et leur humour face à leurs mines sévères.
Prétextant une « découverte fortuite », ils n’ont contrôlé l’identité que des trois personnes racisées (non blanches) présentes (hébergées temporairement à Malagnou), refusant de les laisser circuler librement et ont perquisitionné leur chambre à l’aide d’un chien, alors que leur mandat ne concernait évidemment pas cet espace. Cette chambre est la seule à avoir été perquisitionnée en plus de celle de notre ami et la seule à avoir subi l’examen d’un chien. Il est n’est pas difficile de comprendre que c’est le fait que ces amis ne sont pas blancs qui a justifié cette fouille canine et le prétexte de la « découverte fortuite ».
Le Conseil d’Etat genevois refuse depuis des mois toute forme de négociation quant à l’avenir de cette maison. En lieu et place, on nous envoie les Robocops ! Cette perquisition doit se comprendre comme un élément de la stratégie du prétexte de l’Etat. Après avoir essayer de justifier l’évacuation du 154 route de Malagnou, l’Etat fait maintenant appel au montage juridico-policier pour discréditer la lutte que nous menons pour conserver notre maison. Après Serge Dal Busco, les méthodes autoritaires de Pierre Maudet apparaissent.
L’Etat utilise manifestement tous les pouvoirs qu’il a à sa disposition pour nous empoisonner l’existence et envahir le quotidien en permanence sous des prétextes fallacieux, que ce soit par des incessantes visites officielles des services de Dal Busco pour tous les motifs imaginables ou par des perquisitions soudaines.
Les habitant.e.s de Malagnou ne se laisseront pas intimider par ce nouveau tour de force et refusent de plier sous la répression policière.
Cette arrestation s’inscrit dans le contexte d’acharnement politique aux proportions délirantes sur l’existence même de cette maison collective. La position de l’Etat est en effet ambiguë, d’un côté ils souhaitent mettre fin à l’expérience collective de cette maison squattée en 2012, de l’autre ils sont obligés d’user de toute l’hypocrisie dont ils sont capables en affirmant que cette maison doit plutôt servir à accueillir des requérants d’asile, alors que les autorités de ce canton n’ont jamais démontré la volonté de créer des lieux d’hébergement dignes pour les personne en exil. « Il ne s’agit pas d’une évacuation! » a cherché à nous rassurer un louable gardien de la paix. Alors que nous sommes protégé.e.s par le droit des locataires et menons actuellement une procédure judiciaire au Tribunal des baux et loyers pour contester les mensonges de notre bailleur, une telle tentative aurait en effet été bien mal avisée. Mais lorsque les habitant.e.s refusent de se laisser expulser docilement, reste la stratégie de la tension. « Voilà ce qui vous attend! » Tel est le message que veut faire passer le Conseil d’Etat.
Notre ami, Alexandre est la dernière victime collatérale de la détermination du Conseil d’Etat à faire tomber notre maison, il paie la facture pour une lutte qui a déjà trouvé un très large soutien et ennuie visiblement les autorités.
Malagnou réaffirme sa détermination à conserver ce qui est construit dans cette maison et à défendre un mode d’organisation collectif, horizontal et critique des formes de rapports sociaux dominants. Pour la troisième année consécutive, un bloc révolutionnaire est annoncé pour la manifestation du 1er mai. Les habitant.e.s de Malagnou appellent toute la population genevoise à y participer et à défier l’arrogance de l’Etat, ensemble dans la rue.
Défendons-nous!
Malagnou Kids On The Block – MKOTB