L’Hospice, un ami qui ne nous veut pas du bien

Mercredi 18 janvier 2017, nous, habitant.e.s du 154 route de Malagnou avons vécu la désagréable expérience de subir une visite de l’Hospice Général (HG), institution qui ironiquement, dispense l’aide sociale dans le Canton. Celle-ci nous a été imposée par notre bailleur, l’Etat de Genève qui souhaite nous expulser de notre logement et faire disparaître un projet de 14 logements et ateliers collectifs fonctionnant en autogestion, pour confier le bâtiment à l’HG précité.
Revenons un moment sur la genèse de cette visite : fin décembre 2016, date à laquelle notre contrat de bail s’est officiellement terminé, les représentants de l’Office des bâtiments (OBA, placé sous la responsabilité de M. Serge Dal Busco) ont bien été obligés d’admettre que bien qu’ils prétendent que notre maison doit être transformée en foyer pour requérant.e.s d’asile, aucun projet d’aménagement concret n’a été établi et qu’ils n’ont en réalité aucune idée de la faisabilité du projet. Un peu gênant quand ils nous ont asséné que l’on devait déguerpir en juin 2017…
Alors on répare vite l’erreur : l’OBA nous annonce immédiatement une visite du service technique de l’HG. Un groupe de 8 personnes se présentent à notre porte et curieusement, 3 d’entre eux n’appartiennent pas du tout au service technique. Nous reconnaissons le chef de la sécurité de l’institution, accompagné de deux robustes gaillards se présentants comme des « médiateurs de crise ». La discussion est bien entendu cordiale mais nous sommes interloqué.e.s face à ce déploiement.
A l’intérieur, les techniciens et architectes mandatés débordent de créativité à l’idée de détruire l’ensemble des aménagement réalisé collectivement par les habitant.e.s. Ces personnes ne voient que des espaces à aménager du point de vue de l’optimisation à tout prix. Fini les annonces d’un foyer familial. Il faut voir grand : on parle de 30 requérant.e.s d’asile entassé.e.s dans une maison dans laquelle nous vivons à 14 en partageant une seule salle de bain. Il est évident que nous vivons au 154 route de Malagnou dans un confort relatif qui est largement compensé par l’expérience et la richesse de notre vie communautaire. Mais qu’en serait-il de migrant.e.s parqué.e.s, contre leur gré, par décision administrative ?
Pour créer de l’espace, on peut compter sur les architectes de l’HG qui n’ont aucune retenue à parler devant des locataires en fin de bail comme s’ils avaient déjà été expulsés. Des discussions surprenantes sont saisies à propos de renommer notre sous-sol en « entresol », afin de créer plus d’espaces d’entassement et ce au mépris de l’art. 76 de la loi genevoise des construction et installation diverse (LCI) qui interdit de loger des personnes en dessous du niveau du sol.
Une aile de la maison a été fermée en 2013 en raison de la présence d’amiante. A l’époque, l’Etat de Genève avait usé et abusé de la rhétorique technique pour expliquer que cette partie de la maison était insalubre et que nous devions l’évacuer. En 2017, quand il s’agit de nous expulser avec un nouveau prétexte, coup de théâtre cette aile devient tout à coup facilement habitable pour les migrant.e.s !
De qui se moque-t-on ? De deux choses l’une : si l’aile est habitable, pourquoi les autorité ont-elles supprimé 10 logements étudiants en 2013 ? Si elle ne l’est pas, elle doit répondre du fait qu’elle est prête à envisager de loger des requérant.e.s d’asile dans des conditions sanitaires illégales. Même s’il ne s’agit que des prémices du projets, c’est déjà scandaleux.
Dans tous les cas, subir une visite pour transformer votre maison en vue de votre expulsion est une expérience humiliante que l’on ne souhaite à personne. Quand cette même visite fait apparaître que les motifs invoqués pour vous expulser ne sont que des prétextes, c’est rageant. Quand les personnes à l’œuvre sont des collectivités publiques censées pourvoir à l’aide sociale et à la construction de logements pour la population, cela tourne à la farce.